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Startup Digital

Biomemory : le stockage des données sur ADN pour les faire durer presque éternellement

Publié le 06 mai 2024|par Jean-Sébastien Zanchi

Grâce à son système moléculaire, la société promet non seulement une immense durée de vie des données, mais aussi de réduire la surface et la consommation énergétique des centres de données

Face au défi du stockage de nos données, une solution : l’ADN. Plutôt que de se servir d’un support électronique comme pour nos disques durs actuels, Biomemory a choisi de coder les 0 et les 1 sur ces molécules constitutives du vivant. Une technologie de pointe qui présente trois avantages : consommer moins d’énergie, être plus stable à travers le temps et occuper beaucoup moins de place que les solutions existantes.

« Notre solution de stockage est des millions de fois plus compacte, puisqu’un nucléotide ne demande que 50 atomes pour coder un bit, contre des millions pour un bit avec les systèmes d’aujourd’hui. Les données des dix millions de centres de données recensés aujourd’hui dans le monde pourraient par exemple tenir sur seulement 200 grammes d’ADN, explique Stéphane Lemaire, directeur de recherche CNRS au Laboratoire de Biologie Computationnelle Quantitative (LCQB, CNRS / Sorbonne Université), cofondateur et directeur scientifique de Biomemory. Ils occupent une surface de 200 km², soit, deux fois celle de Paris ; d’ici 2040, ils atteindront la surface d’un pays entier. »

De l’ADN fabriqué avec des imprimantes à jet d’encre

Face à cette demande exponentielle (une heure de conduite autonome d’une Tesla génère par exemple 3 To de données), il va même devenir très difficile pour les industriels de tenir le rythme de fourniture du matériel nécessaire à la construction des centres de données. « Il faut également tenir compte du problème énergétique, leur empreinte carbone est désormais supérieure à celle de l’aviation, puisqu’il faut non seulement alimenter les serveurs, mais aussi les refroidir, sans compter la fabrication du matériel et des disques qu’il faut remplacer tous les trois ans », constate le scientifique.

Des défauts que ne présente pas l’ADN puisqu’il se conserve à température ambiante et peut rester stable des millions d’années. « Il est relativement facile de convertir des 0 et des 1 en ATCG (adénine, thymine, cytosine et guanine ; les quatre bases de l’ADN), le plus difficile est de le fabriquer, puis de le décoder ; c’est ce sur quoi nous travaillons. » Pour y parvenir, le chercheur et ses équipes ont mis au point un système d’impression basé sur des imprimantes à jet d’encre industrielles : « Nous avons créé 16 encres ADN différentes et 4 enzymes qui permettent de fabriquer l’ADN dons nous avons besoin pour stocker les informations », détaille Stéphane Lemaire. Et pour ce faire, Biomemory a choisi de ne pas utiliser les solutions actuelles à base de produit pétrochimiques, mais… du sucre biosourcé.

DNA card - Biomemory

S’insérer dans les systèmes informatiques actuels

Le savoir-faire de la société n’est cependant pas que biochimique : « Nous avons une démarche système qui permet de nous intégrer aux interfaces de nos clients », explique Erfane Arwani, cofondateur et CEO de Biomemory. Difficile en effet de remettre en question l’architecture réseau telle qu’elle est conçue aujourd’hui, il vaut mieux pouvoir y inclure ces nouveaux systèmes de stockage. Et ces derniers suivent une progression rapide. Après avoir commercialisé des supports de stockage de 1 ko au format carte de crédit — surtout pour démontrer que la technologie est fiable —, Biomemory proposera prochainement un système d’imprimante pour ses premiers clients « désirant stocker 100 Mo à 1 Go, pour qu’ils puissent tester notre technologie avant de s’engager à plus long terme », détaille le dirigeant.

Biomemory sera très légitimement présente sur le stand du CNRS à VivaTech et au-delà de la présentation de sa technologie du futur, présentera le premier exemplaire de leur armoire de stockage destinée aux centres de données. « Elle pourra stocker un millier de ces cartes dont la densité sera largement augmentée jusqu’à un pétaoctet par carte. On atteindra ainsi un exaoctet de stockage par armoire », s’enthousiasme Erfane Arwani. « C’est l’équivalent de plusieurs centaines de milliers de disques », confirme Stéphane Lemaire.

De quoi donner le tournis quand le chercheur se souvient de l’un des premiers faits d’armes de la société, il y a à peine trois ans : « En 2021, nous avions proposé aux Archives nationales d’encoder sur de l’ADN la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen et la Déclaration des droits de la Femme et de la citoyenne. Depuis, c’est la première institution au monde à archiver de l’ADN ». Et les récipients les contenant sont stockés dans la même armoire en fer que les déclarations originales. Avec sa durée de vie garantie de 50 000 ans, cette version sera certainement encore lisible quand celle sur format papier aura disparu.

Biomemory Executive Team

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