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Startup Espace

Ion-X déplace les satellites grâce à ses ingénieux moteurs à ions

Publié le 24 janvier 2024|par Jean-Sébastien Zanchi

Imaginés par Jacques Gierak, lauréat de la médaille de l’innovation du CNRS 2023, les moteurs à faisceaux d’ions de la start-up vont commencer à équiper des satellites commerciaux dès cette année. Une première phase vers l’industrialisation de leur fabrication.

Quand un simple sel liquide à température ambiante propulse des satellites.

La technologie de rupture de la start-up Ion-X trouve ses fondements dans les travaux de Jacques Gierak, ingénieur de recherche CNRS au Centre de nanosciences et de nanotechnologies (CNRS/Université Paris-Saclay), cofondateur et conseiller scientifique de la société : « Le principe du propulseur électrohydrodynamique (EHD) existe depuis la fin des années 50 avec du glycérol, mais notre expertise sur les nanotechnologies nous a permis de miniaturiser le dispositif pour qu’il puisse être embarqué dans des engins spatiaux de petite taille ».« Le marché visé est celui des satellites entre 10 et 150 kilos, explique Thomas Hiriart, CEO d’Ion-X. Cette catégorie connaît une croissance importante ces dernières années avec plusieurs centaines de lancements par an. Leur propulsion sert notamment à rehausser leur altitude, à éviter les débris et à se désorbiter quand ils arrivent en fin de vie ». Pour parvenir à équiper ces engins spatiaux légers, la compacité est donc une donnée cruciale : « Le liquide est diffusé sur une plaque constituée de sites nanométriques qui, soumis à un champ électrostatique extrême de l’ordre du milliard de volts par mètre, créent une multitude de structures émissives hydrodynamiques appelés « cônes de Taylor ». Ces structures dissocient les constituants du liquide que sont les anions et les cations sous forme d’ions libres. Ces particules sont alors éjectées et accélérées à très grande vitesse — plusieurs centaines de km/seconde — et fournissent ainsi l’effet de propulsion », détaille Jacques Gierak.

Le principe du propulseur électrohydrodynamique (EHD) existe depuis la fin des années 50 avec du glycérol, mais notre expertise sur les nanotechnologies nous a permis de miniaturiser le dispositif pour qu’il puisse être embarqué dans des engins spatiaux de petite taille ’’

Jacques Giérak

Ingénieur de recherche CNRS au Centre de nanosciences et de nanotechnologies (CNRS/Université Paris-Saclay)

Deux satellites pour des premiers lancements en 2024

Cette technologie présente plusieurs avantages par rapport aux propulseurs plasma qui nécessitent notamment une réserve de gaz importante et une régulation de la température très minutieuse. « Notre technologie offre un très bon rapport poussée-endurance et quelques centaines de millilitres de liquide procurent une autonomie comprise entre trois et cinq ans, argumente Thomas Hiriart. Tandis que les panneaux solaires et les batteries embarqués dans ces petits satellites sont tout à fait suffisants pour alimenter le système électrique de notre moteur ».

Des arguments qui ont déjà convaincu deux fabricants de satellites de tester la technologie d’Ion-X : le Bulgare EnduroSat et le Danois Space Inventor. « Notre modèle économique est d’être un équipementier, nous fournissons nos moteurs aux constructeurs de satellites qui les intègrent dans leurs plateformes. Les premiers vols se feront ainsi entre la mi-2024 et le début 2025 », se félicite Thomas Hiriart.

Equipe d'Ion-X

Un accompagnement pour développer l’aspect commercial

Pour parvenir à ce résultat plus que concluant, il aura fallu en plus du savoir-faire reconnu de Jacques Gierak — il est lauréat de la médaille de l’innovation du CNRS en 2023 —, un accompagnement infaillible. « Le premier brevet remonte à 2017 », se souvient Jean-Marc Schmittbiel qui a coordonné toute la stratégie de valorisation et de protection intellectuelle vitale à l’épanouissement du projet pour CNRS Innovation.

« Grâce à cela, nous avons trouvé un premier financement auprès du CNES (Centre national d’études spatiales). D’autres brevets ont ensuite été déposés afin de constituer un portefeuille technologique couvrant les principales innovations. C’est cette base solide qui a permis notamment de rassurer les investisseurs. » Et Jacques Geriak de confirmer : « Nous avons pu également bénéficier d’un financement de prématuration de la part du CNRS qui a permis de poursuivre nos travaux ». Une démarche payante puisque dès 2019 Airbus Defence and Space entre dans la danse et contribue lui aussi au financement pour les premiers essais du moteur. Enfin, le projet a aussi été accompagné par le programme RISE du CNRS, aidant à la création de start-up.

« C’est un contact chez Airbus Ventures, Anabelle Oliveira, qui nous a conseillé de passer par Technofounders pour continuer à développer le projet et en faire une offre commerciale », explique Jacques Gierak. Cette société française, fondée par trois polytechniciens, est ce qu’on appelle un « start-up studio » : « Elle repère les technologies de rupture dont le potentiel permet une application business et la génération d’un premier chiffre d’affaires », confirme Thomas Hiriart. Lui-même, ancien ingénieur Supaéro passé également par le conseil en direction générale, s’est laissé convaincre en 2022 par Technofounders de prendre la direction de la start-up Ion-X.

Une structuration qui permet à la société de passer un cap : « Alors que nous avions réussi à financer le laboratoire à hauteur de 400 000 euros durant les quatre premières années, la start-up a réussi à lever 10 fois plus en une seule fois », se réjouit Jean-Marc Schmittbiel en faisant référence aux 3,8 millions d’euros sécurisés en juin 2022. « Nous prévoyons une série A l’année prochaine, pour mettre en place notre ligne de production. Nous sommes déjà capables de sortir plusieurs moteurs par an grâce aux moyens mis à disposition par le CNRS, mais nous visons une cadence industrielle de plusieurs centaines de moteurs annuels », se projette Thomas Hiriart. Quand on sait que les carnets de commandes de la concurrence sont pleins et nécessitent au moins un an d’attente, Ion-X a donc toute latitude pour satisfaire la demande et se faire une place sur ce marché en pleine expansion.

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