La start-up Poladerme est nominée pour le prestigieux Prix Best Start-Up de la fondation Galien pour sa solution d’aide au diagnostic dermatologique notamment des cancers de la peau. Une invention qui conjugue système optique et intelligence artificielle.
Pénurie de spécialistes oblige, aujourd’hui, il n’est pas rare de devoir attendre jusqu’à huit mois avant d’obtenir un rendez-vous avec un dermatologue. Pourtant, le diagnostic de la peau, le plus grand organe du corps humain, permet d’évaluer l’état de santé d’une personne et de mettre en évidence de multiples affections, allant de lésions bénignes aux mélanomes. Par ailleurs, les outils d’aide au diagnostic de maladies de la peau s’avèrent souvent archaïques ou encombrants. Les dermatologues utilisent en effet un dermatoscope, une loupe pourvue de sources de lumières, qui ne permet pas de récolter des informations au-delà de la surface de la peau.
Forte de ces constats, la start-up Poladerme a mis au point une solution rapide et non invasive d’aide au diagnostic dermatologique, notamment des cancers de la peau. Sa solution de technologie d’imagerie, le dispositif Poladerme, améliore sensiblement la caractérisation de lésions cutanées en analysant en profondeur les tissus et évalue l’état de santé de la peau.
« Avec Christian Heinrich, nous avons démarré il y a une quinzaine d’années nos travaux sur la spectropolarimétrie et les techniques de traitement et d’analyse d’images, au sein du laboratoire ICube (CNRS, Université de Strasbourg, ENGEES, INRIA, INSA Strasbourg, INSERM), à Strasbourg. Christian travaillait sur le traitement des données et l’apprentissage statistique, tandis que je développais des dispositifs d’imagerie optique polarimétrique. Nous avons mené nos recherches en collaboration étroite avec des partenaires du monde médical et avec l’INSERM. En 2017, nous avons déposé un premier brevet. Puis nous sommes sortis du laboratoire pour mener des applications pratiques en santé. Elles ont fait leurs preuves en dermatologie », explique Jihad Zallat, enseignant-chercheur à Télécom Physique Strasbourg (Université de Strasbourg) et conseiller scientifique de Poladerme. Le scientifique poursuit : « nos expérimentations sur des souris ont démontré que ce type d’imagerie est capable de détecter un changement au niveau des tissus. Petit à petit, nous avons affiné notre dispositif pour distinguer la signature optique d’un tissu sain de celle d’un tissu lésionnel ».
Peu avant le Covid, le duo de chercheurs met au point des essais cliniques sur l’humain avec les spécialistes en dermatologie du CHU de Strasbourg. Les essais s’avèrent concluants.
2021 marque la création de la start-up Poladerme, propulsée par la SATT Conectus d’Alsace. Le dispositif, créé avec l’entreprise industrielle Archos, de la taille d’un dermascope standard, exploite le champ de lumière à différentes longueurs d’onde. « Nous faisons varier la longueur d’onde pour sonder la peau à différentes profondeurs. La lumière bleue livre une information à la surface de la peau et l’infrarouge permet d’atteindre le derme. Nos images fournissent aux spécialistes des informations invisibles à l’œil nu », s’enthousiasme Jihad Zallat. « Avec la spectropolarimétrie, nous orchestrons des interactions lumière-tissu qui modifient l’état de polarisation de l’onde. Ces changements révèlent la signature de la structure cutanée, donc de la lésion », ajoute Jihad Zallat.
Poladerme vise deux types d’applications. D’une part, la cosmétologie, en détectant l’état de vitalité de la peau. D’autre part, le médical, en proposant un véritable outil d’aide au diagnostic.
La philosophie de Poladerme est de proposer des dispositifs peu coûteux pour les médecins. A terme, Poladerme pourra être utilisé par des généralistes afin de décharger les dermatologues et de leur permettre de se consacrer aux cas les plus urgents. On peut imaginer que le patient lui-même scanne ses lésions et dispose d’un dispositif d’alerte chez le médecin en fonction des résultats. ’’
Jihad Zallat
En lien avec les médecins spécialistes qui utilisent Poladerme, la start-up collecte des données et constitue une bibliothèque d’images dermatologiques, comprenant tous les phototypes de peau. Les chercheurs vont confronter ces signatures optiques avec l’analyse histopathologique. Des algorithmes d’apprentissage dégageront les indicateurs pertinents. Les dermatologues pourront ensuite confronter leur résultats aux algorithmes ou demander des images à la base de données.
Poladerme, qui a déjà reçu le soutien de la SATT Conectus, de la Région Est et un Prix de la Fondation Force à Strasbourg, est aujourd’hui nominée pour un prix international, le Prix Galien[1] USA Medical Technology 2024, catégorie start up awards. Le Prix Galien, considéré comme « l’équivalent du prix Nobel de la recherche biopharmaceutique », récompense des innovations d’exception dans le domaine de la santé. Verdict le 7 novembre à New York.
Cette innovation est « très bien accueillie par la communauté médicale. La nouvelle génération de médecins est demandeuse de technologies », confie Jihad Zallat. Et de conclure : « pour nous, c’est une satisfaction que nos recherches et innovations soient utiles à la société ».
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