Afin de limiter l’utilisation de gaz réfrigérants à effet de serre, des alternatives solides sont recherchées. Le projet Recool, mené par Gael Sebald du laboratoire international ELyTMaX (CNRS/INSA Lyon/École Centrale de Lyon/Univ. Claude Bernard/Université de Tohoku), est ainsi basé sur du caoutchouc naturel que l’on étire fortement cycliquement. Un premier prototype parvient déjà à descendre la température de dix degrés Celsius.
Du frigo domestique à toute la chaîne du froid, la réfrigération joue un rôle crucial dans notre société. Elle est cependant basée sur l’utilisation de gaz réfrigérants qui, historiquement, ont été toxiques et/ou à fort effet de serre. L’isobutane, le CO2 et l’ammonique ont ainsi laissé place aux chlorofluorocarbures (CFC), qui se sont révélés nocifs pour la couche d’ozone. On leur préfère désormais les hydrofluorocarbures (HFC), qui ont cependant un effet de serre plusieurs milliers de fois supérieur à celui du CO2 et qui représenteraient jusqu’à 3 % de l’effet de serre mondial. Ces gaz se retrouvent malheureusement pour l’essentiel dans l’atmosphère en fin de vie du dispositif de refroidissement. Des alternatives doivent donc être trouvées, notamment sous la forme de réfrigérants solides.
« Il existe des solutions à base de céramiques ou de métaux, sous champs électromagnétiques ou sous contrainte mécanique, mais elles reposent souvent sur des matériaux peu abondants et chers, tempère Gael Sebald. Certaines utilisent parfois des terres rares, dont l’approvisionnement est compliqué. »
Gael Sebald est professeur à l’Institut national des sciences appliquées de Lyon (INSA Lyon) et membre du laboratoire international de recherche Engineering science Lyon Tohoku, materials under extreme conditions (ELyTMaX, CNRS/INSA Lyon/École Centrale de Lyon/Univ. Claude Bernard/Université de Tohoku). Il travaille ainsi à Sendai au Japon, tout en gardant un lien étroit avec ses collègues basés en France. « Ce laboratoire, qui joue le rôle de passerelle entre l’ingénierie française et japonaise, nous permet de travailler ensemble avec des experts japonais dans le contrôle des transferts thermiques, qui sont la clé de la réussite pour la réfrigération solide », souligne Gael Sebald. « Nos thèmes de recherche généraux concernent le comportement des matériaux sous des conditions extrêmes. Cela fait penser à l’étude de leur endommagement, mais nous y menons aussi des études où nous utilisons les propriétés qui apparaissent alors. C’est le cas de Recool. »
Le projet Recool vise à développer une solution de réfrigération solide à base de caoutchouc naturel. Car si Gael Sebald est expert en matériaux intelligents pour la conversion de l’énergie tels que les céramiques ferroélectriques, cela ne l’empêche pas de regarder du côté des matériaux polymères. Il étudie ainsi depuis les années 2010 le caoutchouc et sa capacité à s’autoréchauffer ou s’autorefroidir lorsqu’il est étiré ou relâché. On parle d’effet élastocalorique.
« Nous avons breveté un système d’assemblage de tubes en caoutchouc remplis d’eau comme fluide caloporteur, explique l’enseignant-chercheur. Nous étirons de manière unidirectionnelle et cyclique des tubes de caoutchouc, de 400 à 600 %, grâce à un système mécanique tout en laissant le passage du fluide. L’eau est ainsi successivement échauffée puis refroidie lors des cycles mécaniques. Par un mouvement synchrone du fluide, il est possible alors de déplacer de la chaleur vers un réservoir chaud et de prélever de la chaleur d’un réservoir froid, ce qui est le principe même de la réfrigération. »
Un premier prototype a servi de preuve de concept. Il parvient à atteindre un à deux watts de réfrigération et à descendre de dix degrés. « Recool est soutenu par CNRS Innovation afin d’aller plus loin et de monter en échelle », se réjouit Gael Sebald. L’utilisation du caoutchouc naturel est particulièrement intéressante, car c’est un matériau bon marché et qui est déjà produit en énormes quantités. « Chaque année nous produisons en volume dix fois plus de caoutchouc que de gaz réfrigérants, ce qui signifie que la filière est tout à fait capable de suivre la demande si le caoutchouc se démocratise comme réfrigérant solide », souligne le scientifique.
Chaque année nous produisons en volume dix fois plus de caoutchouc que de gaz réfrigérants, ce qui signifie que la filière est tout à fait capable de suivre la demande ’’
Gael Sebald, chercheur au laboratoire international ELyTMaX et porteur du projet Recool.
L’avancée du projet vers un réfrigérateur plus grand et plus froid fait face à deux grands défis. L’énorme élongation du caoutchouc nécessaire pour atteindre un effet intéressant demande le développement de tout un système d’actionnement qui doit garantir l’homogénéité mécanique et hydraulique du système. Sans cela, d’importantes pertes de performances ont lieu.
Ensuite, le caoutchouc est un isolant thermique qui a peu de propension à échanger de la chaleur avec l’extérieur, et sa diffusion thermique reste lente. « Nous pensons pouvoir compenser ce problème par la géométrie et la finesse des tubes, note Gael Sebald. Cela sera nécessaire pour changer d’échelle et atteindre un produit grand public. Nous réfléchissons d’ailleurs à savoir si cela passera par la fondation d’une start-up ou à une collaboration avec un industriel français ou japonais. Nous devons en tout cas continuer d’améliorer notre prototype avant de faire ce choix. »
Le prototype qui a servi de preuve de concept au projet Recool (c) Gael Sebald
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